L'année dernière, c'est « Embras(s)er » qui a déboulé dans ma vie, après plusieurs mois de forts tsunamis émotionnels. Embrasser dans le sens accepter, accueillir, transformer même.
Eh bien c'est peu de dire comme cette intuition s'est révélée totalement juste.
J'ai passé (et passe encore) mes journées à accepter tumulte après tumulte, cabossages du cœur et autres bleus à l'âme, notamment dans le domaine amical et professionnel.
Je me suis littéralement obligée à regarder la réalité en face et à faire avec.
J'aurais pu continuer à valser avec le déni, qui est un séducteur invétéré. Mais je lui ai préféré, avec beaucoup de difficulté et souvent à contrecoeur, la lucidité qui, elle n'y va pas par quatre chemins.
Je sais que le chemin de l'acceptation est le bon. Mais je peux vous dire qu'il est escarpé et rempli d'obstacles.
Il y a des larmes et des doutes, des peurs et instants de grâce. Parfois, le tunnel semble bien sombre et sans fin. Puis, sans qu'on comprenne vraiment pourquoi, on est juste à la sortie, le soleil brille, on se sent bien.
Ce qui est difficile, c'est qu'on ne contrôle rien. C'est comme le pardon, le décider ne fait pas tout, mais c'est un premier pas indispensable. Il faut réussir à continuer, à garder confiance, à accueillir les belles surprises de la vie.
Car embrasser, ce n'est pas seulement accepter ce qui nous rend triste, nous déçoit, nous heurte, c'est aussi (surtout) se laisser embarquer par l'inattendu.
En cette fin de mois d'octobre, j'ai envie de vous raconter ce que cette année m'a appris et contine de m'apprendre.
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Comprendre l'autre (et donc moi)
Une de mes amies a un fils qui a quasiment le même âge que ma fille. 13 ans. L'adolescence dans toute sa splendeur. C'est une étape qui lui apporte beaucoup de souffrance en tant que mère. Elle a du mal à « voir partir son bébé » comme me le dit souvent. Tout lui rappelle que ce temps-là est définitivement révolu : les changements physiques, l'éloignement émotionnel, les centres d'intérêt qui changent totalement... Elle sait qu'elle n'a pas le choix, mais elle en ressent beaucoup de douleur.
Pour ma part, c'est le contraire, j'aime beaucoup plus voir mes enfants devenir adultes que je n'ai aimé devenir mère de bébés. Et fut un temps où j'étais assez moqueuse envers ces mamans poules.
Je ne me moque plus. J'ai compris aujourd'hui combien cette émotion de la « finitude » peut être intense et douloureuse. J'ai compris qu'il n'y a pas de petits deuils, de petites souffrances, que ce qui est ressenti et exprimé est forcément réel et n'a pas à être jugé ou même simplement commenté. Juste accueilli.
Alors, je l'écoute, je lui offre ce temps, cet espace, tout en sachant que moi-même j'aurai un temps et un espace pour exprimer mes propres ressentis.
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Je ne suis pas le centre du monde (toi non plus)
Lorsque j'étais salariée, je travaillais pour un très grand groupe dans lequel il y avait régulièrement des plans sociaux. Lors d'une fusion avec un autre groupe, de nombreux postes avaient été fusionnés et nombre de nos collègues étaient alors parti·es en pré-retraite. Pour la majorité d'entre elleux, un soulagement.
Le DRH faisait partie de cette cohorte sur le départ. Pourtant, quelques mois après la fin du plan social, il continuait à venir « trainer » dans l'entreprise. On le croisait dans les couloirs, dans le jardin intérieur, l'air de plus en plus triste et perdu. C'était vraiment perturbant de sentir qu'il n'arrivait pas à changer de vie, à accepter de ne plus avoir de responsabilités professionnelles, de pouvoir, de ne plus être le centre d'un certain monde.
Cela m'a beaucoup marquée et même si c'était il y a 20 ans, j'y ai beaucoup repensé cette année. Lorsque j'attendais des réponses, des messages, des signes. Lorsque j'avais l'impression qu'on m'oubliait, qu'on ne pensait pas à moi, que je ne comptais pas.
Accepter cet état de fait : je ne suis pas le centre du monde, à part du mien. Même les personnes qui me sont proches, qui m'aiment, ont leurs préoccupations, leur rythme propre, leur manière de rester en lien.
Et à chaque fois que j'essaye d'aller contre ça, c'est le retour de bâton assuré.
Cela n'empêche pas d'exprimer ses ressentis, ses besoins, ses limites (quand on y arrive, ce n'est pas moins point fort, j'en reparlerai dans une future Clandestine), car accepter que les choses sont ne veut pas dire subir ou baisser les bras. Embrasser ne veut pas dire supporter. C'est apprendre à prendre en compte les deux parties : soi et l'autre. Trouver l'équilibre entre égoïsme pur et don de soi.
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Tel·le que tu es et non pas tel·le que je voudrais que tu sois (pareil pour moi)
C'est la suite logique de la leçon précédente. L'année dernière, j'ai eu un coup de foudre amical. La relation s'est développée très fort, très vite, à en devenir addictive. Vous savez quand vous prenez tellement l'habitude de vous écrire à tous moments que lorsque la fréquence diminue, vous passez par toutes les étapes de la douleur et de l'interprétation, en votre défaveur évidemment.
Et un jour, elle s'est arrêtée, mon amie a cessé de m'écrire et de me répondre, sans que je sache pourquoi. Un joli ghosting en règle.
C'est horrible, le ghosting, qu'il soit brutal ou lent délitement. En tout cas, je le vis très mal. Je me sens nulle, je me demande ce que j'ai fait ou pas fait, dit ou pas dit. Je rumine, je ressasse, pendant longtemps, très longtemps.
En amitié, cela m'arrive très souvent, depuis fort longtemps. Je suis toujours admirative et envieuse de ces groupes de potes, de ces ami·es qui se connaissent depuis toujours. J'ai été beaucoup quittée amicalement, mais je ne m'y habitue pas. A chaque fois, la même douleur, la même incompréhension.
A chaque fois, il me faut des mois, des années même pour certaines, pour accepter l'état de fait. Je ne suis plus dans ta vie. Je ressens la même chose (en beaucoup moins intense, heureusement) lorsque je suis quittée professionnellement.
Sauf qu'en fait c'est le choix de chaque personne qui décide si je continue à faire partie de sa vie, d'une manière ou d'une autre. J'accepte que tu sois tel·le que tu es, même si cela implique je ne sois plus là. Accepter, aussi, de décider qui reste ou pas dans notre vie.
Tellement facile à écrire, tellement dur à traverser.
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Célébrer celles et ceux qui restent
Car oui, on oublie. On ne voit que ce qu'on a perdu. Mais il est toujours temps de choisir de revenir à celles et ceux qui restent.
Lorsque je pleure les amitiés envolées, je choisis aussi et surtout de célébrer celles qui perdurent malgré les tornades.
Lorsque la nostalgie me submerge, je choisis de me concentrer sur ce qui est, l'amour autour de moi, la beauté de la forêt, le calme de ma maison, la chance d'être en bonne santé.
Lorsque je sens le besoin de contrôle m'envahir, je choisis de m'ouvrir au lâcher-prise, aux surprises de l'imprévu.
Je crois qu'une des plus belles preuves d'amour qu'on puisse nous donner, c'est de nous dire : « Je suis là ».
Alors merci à toutes celles et ceux qui sont là, même quand la tristesse, la colère ou la déception nous éloigne un temps, nous rend moins disponible.
A la semaine prochaine, je vous raconterai l'intention que j'ai choisie pour cette nouvelle année celtique. Ou plutôt celle qui m'est tombée dessus !
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Reco culturelle :
Le très beau et sensible podcast de Lucile Bellan sur les deuils : Les gens qui restent